Le Sénat a adopté ce 5 mars à main levée, en première lecture, le projet de loi "d'accélération et de simplification de l'action publique" (Asap) . Le secrétaire d'Etat Olivier Dussopt a défendu en ouverture des débats le 3 mars un texte qui répond selon lui à "une demande forte de transparence, de proximité et de simplification dans les relations entre les citoyens et l'administration", exprimée à l'occasion du Grand Débat. "Notre premier engagement est de favoriser une administration plus simple et plus lisible dans ses processus de décision", a-t-il indiqué. "Le deuxième engagement consiste à développer une administration plus proche des citoyens". Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Economie et des Finances, a de son côté insisté sur la volonté de "simplifier la vie de nos concitoyens et de nos entreprises". Le texte est pour elle "une réponse aux attentes nombreuses et diverses des Français quant à la nécessaire transformation de l'action administrative : décider plus vite, décider plus simplement, plus clairement et au plus près des citoyens", a-t-elle ajouté.
"Rapprocher l'administration des citoyens"
"Ce texte est sous-tendu par l’ambition de simplifier l’action publique", a abondé Jean-François Longeot, président de la commission spéciale sénatoriale. "La simplification (…) doit se traduire concrètement pour nos concitoyens et nos entreprises. À ce titre, le projet de loi va dans le bon sens en simplifiant l’administration et certaines démarches dont les modalités étaient trop contraignantes. Il permettra également de rapprocher l’administration des citoyens, préfigurant ainsi nos débats à venir sur la décentralisation, la déconcentration et la différenciation, a-t-il estimé. Enfin, le projet de loi s’adresse aux entreprises en ce qu’il vise à lever certains verrous afin d’améliorer l’attractivité et la compétitivité de notre pays."
Mais avec des mesures qui touchent aussi bien les particuliers que les entreprises ou l'administration, le projet de loi a été qualifié de "fourre-tout" par plusieurs sénateurs. "Ce texte fait penser à un cercle dont la circonférence est partout et le centre nulle part", a déclaré le sénateur socialiste Jean-Pierre Sueur, dont le groupe s'est abstenu. Dans la majorité sénatoriale, Christine Lavarde (LR) a souligné la nécessité de simplifier, tandis que Michel Canevet (centriste) appelait à "aller plus loin". "C'est du bon travail, il faut continuer à simplifier", a encore jugé le président du groupe RDSE à majorité radicale, Jean-Claude Requier, alors qu'Alain Richard, membre du groupe LREM, envisageait "la perspective d'un dialogue très positif avec l'Assemblée nationale".
Les principaux apports du Sénat
Pour les particuliers, le Sénat a donné son aval à la généralisation du dispositif qui permet de ne plus avoir à présenter de justificatif de domicile pour demander un titre d'identité. Feu vert également à une expérimentation, dans cinq départements d'Occitanie, d'une procédure d'inscription à l'examen du permis de conduire sur Internet.
Pour les entreprises, deux mesures principales sont prévues : garantir à un porteur de projet que si la réglementation évolue durant l'étude de son dossier, il sera soumis aux délais d'adaptation appliqués aux sites existants ; et donner plus de pouvoir de dérogation aux préfets décidant de l'implantation d'un site industriel.
Sur l'assouplissement des conditions de vente en ligne des médicaments, Sénat et gouvernement sont parvenus à un consensus, supprimant la notion de "plateforme" qui inquiétait les pharmaciens. Le texte substitue à l'autorisation préalable aujourd'hui nécessaire pour la mise en place par une pharmacie d'un site de vente en ligne, une simple déclaration d'ouverture.
Les sénateurs ont aussi fait le tri dans les mesures de suppression de commissions et instances consultatives jugées "redondantes" par le gouvernement. Ont ainsi été maintenus le Conseil supérieur de la mutualité, l'Observatoire national de la sécurité et de l'accessibilité des établissements d'enseignement, la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires ou encore la Commission scientifique nationale des collections.
Les sénateurs ont supprimé l'article autorisant le gouvernement à prendre, par ordonnance, les mesures définissant les conditions de recrutement des personnes chargées d'encadrer les volontaires du Service national universel (SNU). Ils ont également introduit de nouvelles dispositions, dont le renforcement de l'information des maires sur les projets d'installations d'éoliennes.
Ultimes retouches en direction des collectivités locales
D'autres modifications intéressant directement les collectivités locales ont été apportées en séance. Pour leur permettre de disposer d’une vision plus précise de leur population, les collectivités vont pouvoir solliciter auprès d’un fournisseur de bien ou de service, ou d’un service public, la communication des informations nécessaires aux opérations de recensement en cas de défaut de réponse de l’administré concerné. Dans le même ordre d'idée, le signalement par les habitants de leur arrivée et de leur départ d’une commune est rendu obligatoire.
Les sénateurs ont aussi prévu que soient publiées, et révisées chaque année, l’ensemble des procédures pour lesquelles le silence gardé par l’administration pendant deux mois vaut décision de rejet et non décision d’acceptation.
Ils ont par ailleurs exclu une mise en cause des propriétaires et gestionnaires de sites naturels ouverts au public au titre de leur responsabilité sans faute du fait des choses. Selon l'exposé des motifs de l'amendement, qui reprend un dispositif figurant dans une proposition de loi de Bruno Retailleau adoptée au Sénat en janvier 2018, "il s’agit d’une mesure de simplification pour les propriétaires et gestionnaires, aujourd’hui dans un vide juridique". Face à des conflits juridiques importants, cette disposition viendra favoriser le développement des sports et activités de nature en allégeant la responsabilité civile des propriétaires et gestionnaires de sites naturels, ont estimé les sénateurs.
Ces derniers ont en outre apporté des précisions rédactionnelles à l'habilitation à légiférer par ordonnance concernant la composition du conseil d'administration de l'Office national des forêts (ONF). Ils ont ainsi prévu d'une part que l'ensemble des échelons de collectivités territoriales siégeront au sein du conseil d'administration de l'ONF, et non dans un comité consultatif annexe et d'autre part, que cette représentation accordera une attention spécifique aux collectivités territoriales propriétaires de forêts relevant du régime forestier.
Enfin, pour tenter de remédier aux difficultés des communes dépourvues d'ingénierie qui hésitent souvent à demander des subventions car la constitution des dossiers s’avère trop complexe et chronophage – ce qui est surtout le cas des petites communes rurales- , les sénateurs ont adopté un amendement qui vise à instaurer la mise en place d’un référent au sein d’une administration des services d’Etat qui piloterait toutes les demandes de subventions et l’instruction des projets d’investissement. L’objectif est triple, souligne l'exposé des motifs : "Simplifier les procédures avec la constitution d’un seul dossier et ne plus demander comme c’est le cas les mêmes documents en plusieurs exemplaires ; accentuer le rôle de conseil de l’administration référente ; consommer des budgets qui parfois ne le sont pas en ayant un réel rôle de coordinateur entre les différents partenaires financiers."
Le projet de loi va maintenant aller à l'Assemblée nationale.
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