Passer de "la débrouille" à une solution "pérenne", tel était le dessein de la proposition de loi de la députée de Seine-Saint-Denis Nadège Abomangoli visant à créer un corps de fonctionnaires pour les 132.000 accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) qui s'occupent actuellement de 430.000 enfants. Mercredi 16 novembre 2022, la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale a rejeté cette PPL au profit d'une simple possibilité d'avancer le moment de passer d'un contrat à durée déterminée (CDD) à un contrat à durée indéterminée (CDI).
Des départs au bout de deux ans et demi en moyenne, un taux d'emplois en CDI de seulement 17%, des saisines de la Défenseure des droits dans le domaine des droits de l’enfant qui portent à 20% sur des réclamations relatives aux difficultés d’accès à l’éducation d’enfants en situation de handicap ou encore, selon l'Unsa, 44% des personnels de direction des établissements scolaires qui signalent des carences dans l'accompagnement de ces enfants, tels sont les constats alarmants soulevés par Nadège Abomangoli devant la commission à l'heure de défendre son texte.
Pour la députée, la création de 4.000 postes d'AESH à la rentrée "tombe à côté du problème" car "rien n'indique que les postes annoncés seront effectivement pourvus". Pourquoi un tel pessimisme ? Nadège Abomangoli pointe le manque d'attractivité du métier : "Les AESH cochent toutes les cases de la précarité : rémunération ridiculement faible – 800 euros mensuels – car corrélée au seul temps de présence en classe sans prise en compte des nombreuses heures de préparation et d'échanges avec les enseignants et les familles, accompagnement de plusieurs enfants, jusqu'à dix par semaine, enchaînement des déplacements entre les établissements. Tout cela nuit à leur bonne inclusion au sein de la communauté éducative en plus de grever leur pouvoir d'achat en raison des frais de transport. De plus, ils ne disposent pas de formation suffisante pour accompagner au mieux les élèves au regard de leur handicap. Ils fonctionnent dans la débrouille et sont souvent réduits à se former par leurs propres moyens."
Sa solution ? Faire des AESH des fonctionnaires de catégorie B afin de leur offrir "une meilleure intégration dans la communauté éducative, une meilleure garantie de formation initiale et tout au long de la vie, des passerelles et des progressions possibles, de la mobilité".
Un CDI possible au bout de trois ans
Pour rejeter la mesure-phare de cette PPL, des députés ont mis en avant le fait que le problème de recrutement ne concernait pas que les AESH, mais plus largement les enseignants pour lesquels "la fonction publique pouvait devenir un carcan", ou que la création d'un corps de fonctionnaires de catégorie B allait exclure du vivier de recrutement des personnes non titulaires du bac.
La commission a finalement opté pour un abaissement du temps à partir duquel un AESH peut se voir proposer un CDI. Jusqu'à présent, la loi prévoyait que "lorsque l'État conclut un nouveau contrat avec une personne ayant exercé pendant six ans en qualité d'AESH en vue de poursuivre ces missions, le contrat est à durée indéterminée". Les députés ont voté une légère inflexion en adoptant un amendement stipulant qu'"un décret définit les conditions dans lesquelles, lorsque l’État conclut un nouveau contrat avec une personne ayant exercé pendant trois à six ans en qualité d’accompagnant des élèves en situation de handicap en vue de poursuivre ses missions, le contrat peut être à durée indéterminée".
Autrement dit, alors que le passage en CDI intervenait de manière automatique au bout de six ans, l'État pourra désormais envisager cette solution après trois ans de contrat. Le député du Val-d'Oise Paul Vannier a estimé que cet amendement "se payait de mots car il n'y a aucun caractère obligatoire à la CDIsation".
La question de la prise en charge de l'intervention des AESH sur les temps périscolaires, aujourd'hui assurée par les collectivités mais suscitant des difficultés récurrentes, n'a, quant à elle, pas été abordée lors des débats. La discussion en séance publique est prévue le 24 novembre.
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