La maison de l'Histoire de France commence à prendre tournure. Le comité d'orientation scientifique a en effet remis au ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, le 16 juin, l'avant-projet de ce futur établissement, objet jusqu'à présent de nombreuses polémiques. Présidé par l'historien Jean-Pierre Rioux - avec Jean Favier comme président d'honneur -, le comité d'orientation scientifique regroupe une vingtaine de spécialistes de l'histoire et des musées. Comme son nom l'indique, l'avant-projet est une description des grandes lignes directrices du futur établissement. Il ne comporte ni projet architectural - le concours n'est pas encore lancé -, ni même de projet muséographique détaillé. Le projet définitif sera remis au ministre de la Culture "avant la fin de 2011", juste avant la création - le 1er janvier 2012 - de l'établissement public administratif de la maison de l'Histoire de France et une ouverture toujours programmée pour 2015.
Les élus du premier cercle
Mais l'avant-projet apporte néanmoins déjà de nombreuses précisions sur un concept encore un peu flou jusqu'à présent. Au-delà des dix points qui résument les préconisations du comité - et notamment la création d'une "galerie des temps" -, les collectivités s'intéresseront surtout à l'articulation entre la maison de l'Histoire de France et les musées sous statut territorial (voir nos articles ci-contre du 20 mai 2011 et du 15 septembre 2010). Le document précise en effet que "la maison de l'Histoire de France agira en interaction avec une multiplicité d'institutions qui ont à connaître de l'histoire, sous une forme ou sous une autre [...]". Cette interaction devrait être très formalisée. Le comité d'orientation scientifique identifie en effet "quatre ensembles distincts", qui forment des cercles concentriques autour de l'établissement (le quatrième cercle concernant les coopérations européennes et internationales).
Viennent tout d'abord les "partenaires premiers". Ceux-ci se composent notamment de neuf musées nationaux - mais situés pour la plupart hors de Paris -, dont la liste était déjà connue et qui formeront une confédération avec la Maison : le musée national de Préhistoire des Eyzies-de-Tayac (Dordogne), le musée d'Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye (Yvelines), le musée de Cluny-musée national du Moyen-Age (Paris), le musée national de la Renaissance à Ecouen (Val-d'Oise), le musée national du Château de Pau (Pyrénées-Atlantiques), le musée des Plans-Reliefs à l'hôtel des Invalides (Paris), l'établissement public du château de Fontainebleau (Seine-et-Marne), le musée national de Malmaison et Bois-Préau (Hauts-de-Seine) et ses annexes (musées de l'île d'Aix et maison Bonaparte d'Ajaccio), les musées et domaine nationaux de Compiègne (Oise) et le musée national de la Coopération franco-américaine de Blérancourt (Aisne). L'avant-projet révèle que s'y ajouteront six autres établissements, dont certains relevant de collectivités territoriales : le musée Carnavalet d'histoire de Paris, le Centre historique minier de Lewarde (Nord), le Centre européen du résistant déporté sur le site de l'ancien camp de concentration du Struthof (Bas-Rhin), la bibliothèque de Documentation internationale contemporaine (BDIC) à Nanterre (Hauts-de-Seine) et son musée d'Histoire contemporaine de l'hôtel des Invalides à Paris, le musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée (Mucem) à Marseille et les Archives nationales d'Outre-mer à Aix-en-Provence.
"Mille lieux d'histoire et de mémoire"
Le second cercle se composera "des grandes institutions de référence historique". Certaines sont nationales - et très parisiennes -, comme les Archives nationales, la Bibliothèque nationale de France, le musée du Louvre, le château de Versailles, la cité nationale de l'Histoire de l'immigration, l'Institut national de l'audiovisuel (INA), le musée de l'Armée, le centre des Monuments nationaux, l'Inrap, l'Institut de France... Mais ce second cercle comprendra également "de grands musées d'histoire en région". L'avant-projet en cite quelques-uns, sans que cette liste soit pour autant limitative : le musée d'Aquitaine de Bordeaux, le musée d'Histoire de Nantes au château des ducs de Bretagne, le musée Dauphinois de Grenoble et le musée de la Révolution française de Vizille, le mémorial pour la Paix de Caen... S'y ajoutent aussi quelques "hauts lieux nationaux", comme le Panthéon ou le Mobilier national aux Gobelins. Pour ces établissements, le partenariat "s'orientera principalement vers la coproduction d'expositions temporaires, de cycles de conférences ou de rencontres". Plus surprenant - mais le comité d'orientation scientifique a su faire aussi preuve de diplomatie -, ce second cercle comprend également les "associations d'élus" (Association des maires de France, maires ruraux, Assemblée des départements de France et Association des régions de France).
Le gros des musées locaux consacrés à l'histoire a toutefois vocation à se retrouver dans le troisième cercle, celui des "'mille lieux d'histoire et de mémoire' qui parsèment notre pays : musées, villes et pays d'art et d'histoire, services d'archives départementales et municipales, bibliothèques, monuments, sociétés savantes, historiaux et mémoriaux, maisons de grands hommes et d'écrivains, unités de recherche universitaires...". Pour ces établissements, la Maison de l'Histoire de France servira avant tout de "lieu d'échange et de partage d'informations". Ceci passera notamment par la création d'un portail diffusant des informations sur les activités de ces institutions, par la publicité donnée à certaines manifestations et par l'organisation régulière de rencontres professionnelles. La Maison pourrait également, grâce à son bâtiment d'expositions temporaires, "accueillir à Paris des expositions montées par des institutions locales, et faciliter leur circulation dans d'autres lieux". Elle devrait aussi coproduire des expositions avec ces institutions, et les montrer à Paris et en région. Enfin, le principe de l'adoption d'un thème bisannuel permettra "de mettre en valeur simultanément des institutions diverses", le thème retenu associant alors manifestations nationales et locales, rencontres et publications. L'avant-projet donne deux exemples possibles de cette approche transversale, portant respectivement sur Saint-Louis et sur le sel dans l'histoire de France.
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